Les écoles de Villennes,
des soeurs de Nevers à Jules Ferry

Une école existe à Villennes dès la fin du XVIIIe siècle ; d'abord réservée aux filles, elle est fondée en septembre 1777 par un testament de la veuve de Pierre Paul Gilbert de Voisins : celle-ci lègue aux villennois une maison et son jardin (n° 1 sur la photo du plan-relief ci-dessous), en attribuant une rente à deux religieuses, sœurs de Nevers ; l'une est chargée de dispenser l'instruction, l'autre de "fournir gratis des médicaments aux pauvres malades". Pendant les troubles révolutionnaires, leur situation devient très précaire et les élèves sont de moins en moins nombreuses.

1791 : La Constitution pose le principe d'une instruction publique,

gratuite et commune à tous les citoyens

En 1792, le notaire et receveur des amendes de Pierre Gilbert de Voisins est nommé maître d'école.

Devenue propriété de la commune en 1796, cette "maison commune" est aussi utilisée comme logement pour les instituteurs ainsi que pour le desservant (le curé). Elle sera utilisée comme école jusque vers 1818.

La première imposition extraordinaire destinée à l'instruction est décidée en 1832, pour "transformer l'école et faciliter l'enseignement de M. Gallien".

1833  : la loi Guizot institue la liberté de l'enseignement primaire et

oblige les communes à avoir au moins une école primaire

En 1834, le conseil municipal souhaite acquérir une autre maison pour faire cesser les servitudes et les frais créés par le logement de l'instituteur et du curé dans la même maison, ainsi que pour séparer les garçons et les filles.

1836 : la loi Pelet incite les communes à avoir une école primaire

pour les filles

En 1841, une propriété est achetée, afin de construire une nouvelle maison d'école, rue de Neauphle (n° 2 sur la photo du plan-relief), comprenant un logement décent pour l'instituteur (Villennes Infos n'existe pas encore : la population en est informée par des affiches et par deux annonces, à son de tambour). Le financement est apporté par une imposition extraordinaire, par un emprunt auprès de la Caisse des Dépôts et Consignations ainsi que par un prêt du notaire.

Cette même année est établie une rétribution mensuelle à payer par les élèves : 1 F pour les enfants commençant à fréquenter l'école ; 1,50 F pour ceux qui savent lire et écrire. Quelques élèves indigents sont admis gratuitement.

En 1845, alors que l'école est construite, un litige intervient avec l'architecte et l'entrepreneur qui ont réalisé des travaux non prévus, transformant "une modeste maison d'école en maison bourgeoise".

En 1853, le maire établit, avec le curé, une liste des enfants devant fréquenter l'école. Des livres récompenseront, bientôt, les élèves qui se sont distingués par leur assiduité et leur application. En 1862, une bibliothèque scolaire est constituée : une armoire contenant plusieurs volumes recommandés par l'Inspecteur.

1867 : la loi Duruy organise l'enseignement primaire féminin, encourage la

création de cours pour adultes et ouvre la voie à la gratuité

en autorisant les communes à établir des impositions spéciales afin d'assurer la gratuité de l'accès aux élèves impécunieux.

La commune a créé des cours d'adultes dès l'année précédente, en fin de journée (après les travaux des champs) pour les jeunes de 13 à 19 ans ; quant à l'imposition, elle n'avait pas attendu la loi !

La femme de l'instituteur  est chargée de la "direction des travaux à l'aiguille".

1881-82 : Jules Ferry est ministre de l'Instruction publique ; deux des

nombreuses lois, qu'il établit,  instituent la gratuité, l'obligation et la laïcité

de l'enseignement primaire

L'organisation du certificat d'études est rendue obligatoire dans chaque département.

Les enfants des deux sexes doivent fréquenter l'école jusqu'à 13 ans. Le garde-champêtre est mis à contribution pour veiller à l'application de ces lois, surveillant particulièrement les enfants des hameaux, qui jusqu'alors fréquentaient irrégulièrement l'école en raison des travaux agricoles l'été et des difficultés de déplacement pendant la mauvaise saison.

En fonction des nouveaux règlements, l'école existante présente une surface et un volume d'air insuffisants. La construction d'une école mixte, comprenant également la mairie et le logement de l'instituteur, décidée dès 1881, fait l'objet de longues études et de multiples débats : la Commission Départementale réagit contre l'augmentation du devis, suite aux modifications demandées par l'Inspecteur Primaire puis par la Commission des Bâtiments civils. Les filles devront avoir leur propre école, comme l'impose la loi aux communes de plus de 400 âmes (Villennes a alors  425 habitants). Elles resteront rue de Neauphle, après la rénovation du bâtiment. Les habitants de Breteuil et de la Clémenterie, trouvant le projet dispendieux et ne facilitant pas l'accès de l'école à leurs enfants, obtiennent que la construction de l'école mixte de Breteuil, décidée en 1882, se fasse en même temps que celle de l'école-mairie.

Suite à une loi de mars 1882, la Caisse des Ecoles est alors créée ainsi qu'une Commission municipale scolaire, destinée à surveiller et à encourager la fréquentation des écoles. Le maire, "s'associant au grand mouvement qui s'opère en France en faveur de l'Instruction", fait don d'une armoire-bibliothèque qui sera placée dans l'école des garçons.

Le financement des dépenses scolaires évolue : l'état s'implique de plus en plus et accorde des subventions croissantes. Les traitements des instituteurs sont fortement augmentés ; même l'institutrice, moins payée que ses collègues masculins, est déjà alors mieux rémunérée que le garde-champêtre ...

  Après l'achat d'un terrain
(n° 3 sur la photo du plan-relief)
et l'étude de plusieurs projets, l'école-mairie est construite et inaugurée en 1887.
 
 
   

L'école de Breteuil est bâtie simultanément sur un terrain de 12,51 ares qui a été vendu par la famille Petitjacques :
- Appoline-Clémentine Martin, veuve de Louis-François Petitjacques, cultivatrice,
- Louis-Paul Petitjacques, cultivateur, et son épouse Claire Blot.

Elle sera bientôt dotée d'une cloche, acquise grâce à une souscription. Le conseil municipal décide d'offrir cinq francs, sur un livret de caisse d'épargne, à chaque élève obtenant le certificat d'études.

En 1892, la commune fait construire des cabanes à lapins dans les écoles ...

 

Plans des 3 écoles de la fin du XIXe siècle

 
 

 

 

Les polémiques sur les écoles

Les conflits entre conservateurs cléricaux et républicains, qui ont marqué la fin du XIXe siècle en France, ont également animé la vie des Villennois. Le Journal de Versailles reproduisait, dans son édition du 21/8/1887, une note adressée aux électeurs de Villennes par MM. Graffoulière, Redaux et Martin, conseillers municipaux républicains :

« Electeurs,
« Depuis près d'un an, certains membres du Conseil municipal ont cherché par des moyens détournés à faire supprimer l'école des fillles, entre autres M. le Maire, en faisant adopter par le Conseil, le mois de février dernier, une délibération tendant à nous déshériter de cette école.
« Sur notre demande une phrase ayant été ajoutée à cette délibération en a détruit la portée et a fait comprendre à la haute administration quel était le but de M. le Maire et de ses coassociés.
« M. le Préfet, éclairé sur cette manœuvre dirigée par une personne qui donne son crédit à un certain journal pour discréditer un de nous, a donné raison à votre pétition en maintenant votre école que nous avons dû défendre.
« Ayant échoué dans leur entreprise, ce sont ceux-là qui, lundi 15 courant, ont cru vous persuader à la distribution des prix qu'ils s'intéressent aux réparations de l'école des filles.
« S'ils marchent depuis la décision de M. le Préfet, c'est qu'ils ne peuvent faire autrement.
« Etant les promoteurs de la pétition qui a déjoué leur plan, chaque semaine nous avons le plaisir de constater par les injures lancées par le journal L'Indépendant de Poissy sur un de nous trois, que nous avons frappé juste en prenant vos intérêts.
« Nous avons le plaisir de vous annoncer que cette affaire, dont nous nous sommes fait une question personnelle, suit son cours.
« Le 3 courant, le dossier de ces réparations a été approuvé par le Conseil départemental et, le 18, par le Conseil départemental de l'instruction publique.
« Nous sommes assurés en outre que ce dossier après ces approbations vient d'être envoyé au ministère de l'instruction publique pour y subir la sanction de ce ministère.
« Telle est la suite, Electeurs, qui est donnée à cette affaire.
« Rédaux, Graffoulière, Martin, Léon.
                « conseillers municipaux.
« Villennes, le 20 août 1887. »

Distributions des prix

1929

Distribution des Prix

Dimanche dernier eut lieu la distribution solennelle des prix aux élèves des écoles de Villennes, sous la présidence de M. Téoullier, Maire, entouré de M. Manganne, adjoint, des membres du Conseil municipal et des membres de la Caisse des Ecoles.
Cette fête de l'enfance, située dans un magnifique cadre de verdure, avait attiré une assistance nombreuse, venue non seulement pour partager la joie de ses enfants, mais encore pour témoigner la vive reconnaissance qu'elle éprouve à l'égard des maître et maîtresse.
La Fanfare de Poissy, sous l'habile direction de M. Jouy, fit entendre les meilleurs morceaux de son répertoire, à la grande satisfaction de toute l'assistance. Tous nos compliments à M. Jouy pour sa direction remarquable.
Après l'audition de la Marseillaise, chacun prit plaisir à écouter écoliers et écolières dans l'exécution du programme bien composé.
Quelques petits acteurs et actrices improvisés furent même particulièrement remarqués.
De superbes volumes furent distribués aux écoliers, ainsi que beaucoup de livrets de Caisse d'épargne, grâce à la générosité de nombreux donateurs.
Ce fut un applaudissement général à la lecture du palmarès. Les écoles de Villennes, sous la direction de Mme Hay, institutrice, et de M. Plet, instituteur, ont remporté, cette année encore, un beau succès :
Certificat d'Etudes primaires : Truet Hélène, reçue avec la mention « très bien » et classée la première du Canton [elle deviendra institutrice] ; Picard Suzanne, classée dans un bon rang. Côté garçons : Vouge Roger, reçu avec la mention « bien» et classé le 9e du Canton ; Malnou Jacques, reçu avec la mention « bien ».
Ces succès font honneur aux élèves et à leur maître et maîtresse : Mme Hay, qui dirige depuis 2 ans l'école des filles de Villennes avec tant de distinction, et dont le dévouement est très apprécié de la population ; M. Plet, qui, depuis 6 ans, dirige l'école des garçons de Villennes et a su mériter l'estime et la sympathie de toute la population. Il vient d'être récompensé de son juste mérite par M. le Ministre de l'Instruction publique. M. Plet, en effet, vient de recevoir la médaille d'argent, la plus haute récompense réservée aux instituteurs publics, la médaille d'argent équivalant, dans l'enseignement, à la médaille militaire dans l'armée.
M. Téoullier, notre nouveau et sympathique Maire, sut recueillir des suffrages unanimes par son discours d'usage, plein d'humour et de bonnes pensées, au sujet de la construction de nos futures écoles. Nous pouvons avoir confiance dans cet excellent administrateur, bien secondé par M. Manganne, adjoint.
M. Téoullier sut adresser à nos instituteur et institutrice des compliments bien mérités.
Ce fut aux applaudissements de toute l'assemblée qu'un bouquet lui fut présenté par deux jeunes élèves pour le remercier comme Président de la Caisse des Ecoles de l'intérêt qu'il porte aux enfants de Villennes.
Et sur un dernier morceau de la fanfare, tout le monde se sépara en se donnant rendez-vous à l'année prochaine pour des moissons futures.
La présence de la Lyre Amicale de Poissy donna un attrait tout particulier à cette charmante fête de famille. Et malgré un effectif réduit dû à la période ingrate des vacances, la Lyre Amicale, dont la réputation artistique n'est plus à faire, nous donna un fort joli concert. D'abord, tout un ensemble de morceaux gais, pimpants, bien choisis pour la circonstance : Ramilette de Epanâ (Bouquet d'Espagne), du compositeur Maquet, fut très goûtée ; mais il serait ingrat de passer sous silence la magnifique interprétalion qu'il nous fut donné d'entendre des Saltimbanques à laquelle le public réserva un chaleureux accueil très justement mérité. Avec une assurance, une compréhension, une technique parfaite, M. Jouy, membre de la Lyre (auquel M. Caron, le distingué Directeur avait, en la circonstance cédé la baguette) situa magistralement tous les motifs si différents qui colorent harmonieusement la délicieuse partition du chef-d'œuvre de Louis Ganne. Les habitants de Villennes n'oublieront pas, et la Lyre Amicale de Poissy trouvera toujours ici l'accueil le plus sympathique.

Journal de Poissy, Meulan, St-Germain-en-Laye, Rueil, Maisons-Laffitte, Marly-le-Roi, Rueil, 8/8/1929