Les premières constructions disparues et leurs propriétaires

Les premiers propriétaires des deux terrains du bout du Parc sont :

- de 1889 à 1899 : Victor Armand Roquencourt, fabricant de fleurs artificielles qui fera construire la villa La Bicochette,

- Arthur (Jean Baptiste Marcelin) Riga, artiste dramatique,

Seul un petit bâtiment existait, probablement celui visible sur la droite de la photo de la villa "Val Rose".

Le propriétaire suivant bâtira sur le terrain situé de l'autre côté de l'avenue de Médan (actuelle avenue Foch) un chalet, qui a également disparu.

 

Ce sera un autre Parisien, Emile Arthur Ferdinand Cadot, tuteur du fils d'Arthur Riga, qui lui succède en 1904 après son décès. Ami d'Emile Havez comme Arthur Riga, il exploitait une maison de jeux, le Cercle Central des Arts et des Lettres. Un caissier de cercle de jeux acquérera plus tard la villa bientôt construite sur ce terrain ...

Vous pouvez lire dans la notice biographique d'Arthur Riga, une lettre à son notaire, lui demandant conseil pour empêcher que des détritus soient jetés dans le fossé séparant son terrain de l'avenue et que des passants s'y arrêtent pour le regarder déjeuner, comme au zoo pour un fauve en cage.

La villa et ses dépendances

Anne Benoît, également domiciliée à Paris, acquiert alors la propriété après son divorce de son premier époux, Alphonse Ducerf, et avant son remariage.

Elle laissera sa marque par ses constructions ; la grille, située sous l'un des perrons de la villa "Marie Isabelle", porte son monogramme.

 

Elle fait bâtir, vers 1910, la villa et ses communs ainsi que le kiosque.

Figurant sur une photo prise pendant le crue de janvier 1910, celui-ci peut toujours être aperçu en bordure du chemin des Canotiers, près du chemin de fer.



La salle d'été, qui sera appelée plus tard "salle de billard", est édifiée l'année suivante.

Une serre sera ajoutée vers 1912 sur le terrain, où se trouvent le chalet et le kiosque.

 

Le second mari d'Anne Benoit possède depuis 1911, plus loin dans l'avenue de Médan, une maison acquise d'Auguste Jacques de Saint Germain, qui l'avait achetée au fondateur du Restaurant du Petit Parc. La propriété de la villa est mise à son nom, en 1918, dans les registres du cadastre. Louis Philippe Beccard est caissier de cercle ; il doit s'agir d'un cercle de jeux, qu'il aurait déplacé de son domicile de la rue de Moscou à Paris à Villennes dans cette première maison puis, peut-être, dans la villa Marie Isabelle.

Certainement pour disposer d'un accès à la Seine, afin que lui-même et ses visiteurs puissent pratiquer le canotage, il acquiert, cette même année, une maison construite deux ans plus tôt sur le sentier du Bord de l'eau, qu'il revendra en 1922.

Après le décès d'Anne Benoit en mars 1921, la propriété de la villa est attribuée à sa fille issue de son premier mariage tandis que son époux en obtient l'usufruit. Ils la vendent en 1924.

 

 

 

Entrez dans la propriété et visitez la villa telle qu'elle était peu de temps après sa construction,

en cliquant ici puis sur la photo.


La propriété s'étend jusqu'à la Seine

Le nouveau propriétaire, Numa Marie Georges Simon, négociant parisien, achète en 1928 l'hôtel-restaurant "le chalet du Parc", situé de l'autre côté du chemin de fer, entre le sentier du Bord de l'eau et la Seine.

Son but n'est vraisemblablement pas d'en poursuivre l'exploitation mais de pouvoir utiliser son port sur la Seine ; on peut penser qu'il souhaite également ne pas être gêné par la circulation et les nuisances sonores qu'il engendrait : lorsqu'il revend la maison (sans le port et une bande de terrain pour y accéder), en octobre 1937, une clause de l'acte de vente interdit dorénavant "de créer [...] un café, restaurant ou hôtel, et d'édifier aucune construction nouvelle de plus de six mètres de hauteur, au faite, afin de ne pas gêner la vue de la propriété [...] dénommée «Marie Isabelle»".

La villa Marie Isabelle est acquise en 1942 par un "directeur de fabrique" parisien. Comme toutes les grandes maisons de Villennes, elle est alors occupée par l'armée allemande pour loger ses officiers (l'un d'eux, qui pratique le canotage, utilise souvent le petit port sur la Seine). Un charcutier, également domicilié à Paris, achète la villa en 1946. Quatre ans plus tard, un nouveau propriétaire ne l'occupera pas et la laissera à l'abandon.

Le Quartier Général de la Plage de Villennes

Henri Joseph Willem fonde la Plage de Villennes, dans l'île de Platais, en 1936, avec son beau-frère Rigobert Cromeck, qui vient de faire construire une maison dans le haut de la rue de la Ravine. Tous deux sont originaires du Nord. Henri Willem prend l'habitude de passer l'été avec sa famille "à la Plage" puis de retourner à Lille. Possédant déjà une maison du quai de Seine, il décide de s'installer de manière plus permanente à Villennes et acquiert, en 1953, la villa Marie Isabelle.

A cette époque, le rez-de-chaussée comprend un salon et deux salles à manger (une grande et une petite) ainsi qu'une véranda ; chacun des deux étages est composé de deux chambres.

Au dessus des deux chambres du premier étage du bâtiment des communs, se trouvent deux chambres de domestiques et des greniers ; au rez-de-chaussée, à côté d'une remise subsiste une écurie.

Le terrain, situé entre l'avenue Foch et le chemin de fer, est alors utilisé comme jardin potager.

La fille d'Henri Willem, puis sa petite-fille, assistée elle-même de sa propre fille, exploiteront la Plage chaque été jusqu'à sa fermeture en 2003. La villa appartient toujours à cette famille devenue villennoise, qui a eu un rôle important dans le développement des loisirs de plein air des Parisiens et l'animation des bords de Seine à Médan.


L'architecture de la villa

La Direction Régionale des Affaires Culturelles d'Ile-de-France, Service Régional de l'Inventaire général des monuments et des richesses artistiques de la France, décrit ainsi la villa Marie Isabelle dans son ouvrage "Autour d'Orgeval de la boucle de Poissy au Pays de Cruye" :

 

Le style néo-Louis XIII de cette maison se réfère à l'architecture française de la première moitié du XVIIe siècle : plan massé,

 


emploi de chaînages de pierres appareillées en harpe (alternance de pierres dont les têtes sont alternativement courtes ou longues),

 

utilisation de la brique et de l'ardoise,


  présence de lucarnes, œils-de-bœuf, souches de cheminées massives ...

Mais ce langage est mis en œuvre avec une grande fantaisie et se trouve complété par des éléments anachroniques :

la marquise abritant l'escalier conduisant au jardin,

  les souches de cheminées placées à l'aplomb des baies (en dessous desquelles sont placées les cheminées intérieures),

les balcons  

 

ou la composition de la façade principale.

Le perron de celle-ci conduit non pas à l'entrée du vestibule dans l'axe, mais à une partie pleine du mur, les passages étant rejetés de part et d'autre ...


Quelques autres détails méritent d'être observés.

 

Le bas-relief de gauche ressemble étrangement à un autre situé à l'intérieur de la la villa "Le vieux Moulin". Un même artiste a-t-il sculpté les deux ou bien sont-ils des moulages d'un motif, représentant des jeux d'enfants autour d'un baquet ou des enfants-forgerons, fréquent au début du 20ème siècle ?