Le tacot de la rive gaucheLe long de la Seine, il n'y avait pas qu'une seule ligne de chemin de fer, celle de Paris à Rouen, qui permettait, aux Parisiens d'y venir facilement en villégiature, notamment, à Villennes. Une ligne secondaire de Meulan à Saint-Germain-en-Laye, longeant une partie de la route de Quarante Sous, était utilisée, de 1912 à 1948, pour transporter vers la capitale les productions agricoles et fruiticoles de notre territoire. Nous avons retrouvé des vestiges de cette ligne. Vous pouvez, même, faire d'agréables balades, à pied ou en vélo, sur son trajet entre Orgeval et Ecquevilly. Les trains de cette ligne disparue n’avaient rien de commun avec les TGV, même avec ceux qui circuleront sur les lignes TER. Par contre, nous pourrions les comparer avec les rames de la future ligne Tram 13 Express car leur voie quittait, de la même manière, ses « sites propres » pour traverser des villes en suivant des rues. Retrouvons son itinéraire et ses stations, en amont de notre territoire depuis Saint-Germain-en-Laye et, ensuite, de Poissy-La Maladrerie à Meulan. Le J2R a publié, en 2013, un article de Claude Barouh L'ancien tramway de Pontoise à Poissy(1), sur la base des résultats des recherches d’historiens amateurs de Carrières-sous-Poissy et d’Andrésy(2), que desservait cette ligne. Ici, nous évoquons la ligne qui longeait la route de Quarante Sous de Saint-Germain-en-Laye jusqu’à Bouafle (16 km), avant de se diriger vers Chapet, Les Mureaux et Meulan (5 km). La courte histoire du tacotCes deux petites lignes de chemin de fer avaient été établies, dans des buts identiques, par la même entreprise. Leur existence n’a pas atteint pas une quarantaine d’années. Les zones agricoles du département de Seine & Oise étant mal desservies par les chemins de fer des grandes compagnies nationales, un réseau secondaire fut mis en service, à partir de 1910. Exploité par la Compagnie des chemins de fer de grande banlieue (CGB), il était conçu, à l'origine, pour être relié aux Halles centrales de Paris. Afin de rejoindre le réseau des tramways, ces petits trains avaient le même gabarit étroit (2,05 m) alors que la largeur de la voie était normale (1,435 m). Le réseau de CGB a été acheté, en 1927, par le département qui en confia l'exploitation à la Société des transports en commun de la région parisienne (STCRP), ancêtre de la RATP. Celle-ci le céda à la Société générale des chemins de fer économiques (SE) en 1933. La ligne de Saint-Germain-en-Laye à Meulan a fonctionné du 13 mai 1912 jusqu’au 1er juillet 1948. Après le déclassement de la section de Saint-Germain à Bouafle en mai 1950, les rails ont été enlevés en 1952. Les trains de cette ligne secondaire étaient, dans la terminologie officielle, des tramways. Comme ceux des villes, ils étaient construits pour circuler sur des routes nationales ou départementales, afin d’éviter des ouvrages d'art et des expropriations de terrains, en établissant la voie dans les conditions les plus économiques. Ces tramways à vapeur complétaient le réseau national, dont ils reliaient économiquement certaines de leurs gares. Notre ligne locale était empruntée par des voyageurs ; toutefois, contrairement à la ligne Paris-Rouen-Le Havre, dont des gares de notre territoire accueillaient les Parisiens y venant en villégiature au bord de la Seine, elle était principalement utilisée pour transporter vers Paris les productions agricoles d’Orgeval, de Morainvilliers, de Bouafle et de Chapet ainsi que les fruits des vergers d’Orgeval et de Chambourcy. Les trains comportaient, le plus souvent, une locomotive à vapeur, un wagon de marchandises et deux ou trois voitures pour les voyageurs. La vitesse variait entre 10 et 30 km/h selon les tronçons. Pour aller de Saint-Germain-en-Laye jusqu’à Meulan, il fallait une heure et demie. Ce « train des maraîchers » avait reçu plusieurs surnoms : - le tacot, ce nom désignant depuis 1905 une vieille voiture automobile qui n'avance pas ; il était employé, également, pour les autres lignes de Seine & Oise et dans diverses régions ; - l’escarbille (titre d’un ouvrage de Michèle Caminade(3) sur ce sujet), en référence aux morceaux de braise s’échappant des foyers des locomotives avec la fumée ; - le Transcarottes (nom venant, selon Madeleine Arnold Tetard(4), de son usage pour le transport de produits maraîchers frais.
Les villes traversées et leurs garesTout en rassemblant des souvenirs de cette ligne de chemin de
fer, nous avons retrouvé des vestiges. Trois types d’arrêts
existaient, avec des bâtiments identiques sur tout le réseau de la
compagnie : De Saint-Germain-en-Laye à
Poissy-La Maladrerie
Le train suivait la route
nationale 190, devenue la RN13, jusqu’à la première station,
située à Chambourcy (route de Mantes). Le bâtiment à droite était la station de Chambourcy. La ligne continuait, le long de la route de Quarante Sous, sur le territoire de Poissy, pour passer à la station de la Maladrerie, qui n’existe plus. Tressancourt
Elle se trouvait en bordure de la route, devant son entrepôt de marchandises ; celui-ci étant devenu une menuiserie, avant d'être remplacé par un établissement d’un groupe international de restauration rapide (évoquant un clan écossais). Orgeval La gare d'Orgeval, transformée en habitation, peut être reconnue à côté de la gendarmerie et de la Maison des associations La Croisée. La gare du côté de la voie, à l'arrivée d'un train
Morainvilliers Un peu plus loin, la ligne traversait la route nationale, pour continuer son parcours, parallèlement à celle-ci, à une distance de quelques centaines de mètres, jusqu’à la station de Morainvilliers. Elle abrite, aujourd’hui, le logement et l’atelier d’un menuisier, à proximité de la route nommée « rue de la Vallée Maria » et du chemin de la Bichaille. Ecquevilly La ligne retraversait la route pour entrer dans Ecquevilly. La station, petit bâtiment à un seul niveau accolé à un hangar en bois reconnaissable (entrepôt de marchandises), se situe actuellement dans la cour de l’école élémentaire Victor Hugo, dans la rue portant le même nom ; elle est devenue l’Espace Jeunesse Loisirs de l’association Mosaïque. Bouafle La station, qui existe toujours, transformée en logement (4 route des Mureaux), avait un rôle important : elle était l’extrémité d’une autre ligne la reliant à Versailles par Maule. Les Mureaux Après la halte de Chapet, la ligne entrait dans Les Mureaux, pour desservir l'arrêt de la place de la Gare, permettant la correspondance avec le réseau de chemin de fer de l’Etat.
Suivant la rue principale, elle se dirigeait vers l’arrêt du chemin de halage, d’où partait un embranchement desservant le port fluvial. Le tacot franchissait, ensuite, la Seine sur le pont routier. Meulan Il traversait l’Île du Fort pour en sortir par le petit pont (l’actuel pont aux Perches) et s’arrêtait, pour les voyageurs, sur le quai, à proximité de ce pont. La ligne se prolongeait jusqu’à la gare des marchandises, située sur la route de Tessancourt. Le site Internet de l’association AGHYN précise que le passage de la voie ferrée à travers Meulan nécessita quelques adaptations de la voirie, la démolition de deux maisons de l’Île du Fort et le percement d’une nouvelle voie, l’actuelle rue Albert Jozon. Une voie ferrée devenue une voie verteUn autre vestige de la ligne du tacot subsiste : le viaduc d’Ecquevilly, qui en était le seul ouvrage d’art. Construit en pierres meulières, il comprend 3 arches dont l’une enjambait le ru des fonds de Romainville, aujourd'hui asséché. La partie de la ligne qui le reliait à Orgeval est devenu un agréable chemin de randonnée, pédestre ou cycliste.
Références 1. L'ancien tramway de Pontoise à Poissy, Claude Barouh, J2R, 2013 2. Le tacot d ela rive droite par le Club Historique d’Andrésy et Carrières-sous-Poissy Histoire 3. L'escarbille, tramway de Seine-et-Oise de Michèle Caminade, Ecquevilly, 1996 4. Le tacot par Histoire du Mantois 5. Les tacots par Pixyrail 6. Le temps des chemins de fer par l'Association généalogique et historique des Yvelines nord |