Les Rosières de Villennes


L'origine des fêtes de la Rosière

La fête de la Rosière existe toujours dans une trentaine de villes et villages de différentes régions françaises, même au Lamentin en Guadeloupe. Non loin de Villennes, à Meulan, le maire qui avait sérieusement l’intention d’enterrer la tradition de la Rosière avec le passage à l’an 2000 était revenu sur sa décision. En 2013, les anciennes rosières de Meulan et celles des autres communes de France étaient conviées à la fête. Elle y était célébrée en mai depuis 128 ans.  En 2025, la ville d'Achères élira, à nouveau, sa rosière. Pour être candidate, il faut avoir entre 18 et 20 ans et habiter dans la ville depuis cinq ans. Il est, également, demandé de montrer son engagement envers la Ville, en ayant la disponibilité pour participer aux grands événements. Après réception de votre dossier, vous serez reçue en entretien. Après l'élection de la rosière par le conseil municipal, elle sera présentée lors de la Fête de la Pentecôte.

Le site Internet, consacré à la fête du village breton Montreuil-le-Gast, nous avait appris l'origine de ces festivités, au cours desquelles était  élue "la plus vertueuse" des jeunes filles du village ; le point fort de la cérémonie était la pose d'une couronne de roses sur sa tête, d'où le nom qui lui est restée : la Rosière.

On attribue l'origine des "rosières" à Saint Médard, évêque de Noyon (Oise) et seigneur du village de Salency, près de Compiègne. C'est vers 525 qu'il couronna de roses sa propre s½ur. Un tableau provenant du retable de la chapelle de Saint Médard, où se faisait le couronnement de la Rosière, les représentent. Saint Médard détacha de sa terre douze arpents, dont il affecta les revenus au paiement de 25 livres versées à la jeune fille la plus vertueuse.

L'institution dura après sa mort, le seigneur de Salency, choisissant la "rosière" parmi les jeunes filles du village. Le 8 juin, jour de la saint Médard, vers deux heures de l'après-midi, la rosière vêtue de blanc, se rendait au château accompagnée de tout le village. Après l'avoir couronnée, le seigneur la reconduisait jusqu'à l'église paroissiale où l'on chantait un Te Deum.

Au cours du XIIIe siècle, cette cérémonie reçut un nouveau lustre. L'agriculture, les plaisirs du village étaient remis à la mode. Il fut de bon ton dans la noblesse de jouer au gentilhomme campagnard. Un grand nombre de fondations analogues à celles de Salency virent le jour. 

 

En 1775, à Lanon, près de Caen, Madame Elie de Beaumont fonda une fête de la rosière. En 1778 un curé lorrain suivit cet exemple à Richecourt. Vers 1875, c'est Nanterre qui a le privilège d'avoir la fête la plus réputée ; elle attire un grand nombre de parisiens.

A l'origine donc, cette fête organisée par les notables et le clergé vise surtout à encourager le progrès des m½urs. Aujourd'hui, cette fête est surtout le prétexte à réjouissance.

Lors de sa dispatition en 2021, son plus fervent défenseur a relaté l'histoire de cette fête traditionnelle de Salency.
Un site relatif à l'histoire de Ferrières apportait un complément.

Au XIXe siècle, l'institution devient une affaire d'état : pour fêter son accession au trône puis la victoire d'Austerlitz, Napoléon décrète que des jeunes filles pauvres et vertueuses seront dotées par l'Etat et mariées. En 1810, pour fêter ses noces avec Marie-Louise d'Autriche, l'empereur ordonne que, dans tout le pays, 6 000 militaires soient mariés avec ces jeunes filles de bonne moralité.

Dans la la plupart des cas, on trouve à l'origine de la fête de la Rosière le legs d'un habitant de la commune.

Les fêtes de la Rosière de Villennes

La fête de 1928


Le 20 mai, après le couronnement d'Adrienne Yard, des "chars fleuris" ont parcouru les rues du village. La Rosière avait pris place dans le premier avec ses demoiselles d'honneur.

 

Cette année n'était peut-être pas celle de la première fête de la Rosière à Villennes mais elle a donné lieu aux festivités les plus importantes, dont des photographies sont conservées par d'anciennes familles du village.

Dans ses souvenirs, Jean Barbier a évoqué la fête de la Rosière, qui a marqué ses débuts dans l'animation artitisque et musicale de Villennes :

Jean Péheu organisa une grande cavalcade avec des chars fleuris, qui fut agrémentée par l'élection de la Rosière de Villennes, les trompettes à cheval de Saint-Germain-en-Laye, une batterie de cors de chasse honorait le char de la Rosière ; venaient ensuite les chars de la chanson, de la fanfare, des jardiniers, des enfants des écoles ; tout le monde était costumé. Le cortège se groupait aux écoles de Breteuil et défilait dans les rues de Breteuil et Villennes. Quelle joie ! Quelle ambiance ! On avait eu beaucoup de mal pour organiser tout ça mais quel résultat !

 Journal de Poissy, Meulan, St-Germain-en-Laye, Rueil, Maisons-Laffitte, Marly-le-Roi, 17/5/1928


 

Le Villennois chanceux qui a gagné un âne disposait-il d'un terrain ou d'un grand jardin ?

Les électrices de la Rosière étaient d'autres jeunes filles, dont certaines familles sont encore bien connues : Henriette Bellugeon, Andrée Binet, Yvonne Borné, Marie Bouin, Simonne Bourgeois, Jeanne Bourreau, Aimée Chalmas, Geneviève Conté, Raymonde Conté, Louise Delpierre, Andrée Deshayes, Louise François, Marcelle Lalès, Jeanne Lesieur, Paulette Marlow, Denise Menecker, Denise Meunier, Simonne Meunier, Christiane Mirgon, Fernande Paris, Léontine Pelgas, Yvonne Poignant, Georgette Rivière, Elise Tiphaine, Irène Truet, Reine Vignaux, Louise Voyer.

La fête de la Rosière organisée par les sociétés locales, sous le patronage de la Municipalité, a obtenu Dimanche dernier un franc succès.
Un joli cortège fleuri composé de superbes chars parcourut dans l'après-midi les environs et la localité.
A 18 heures, la dislocation eut lieu sur la place de l'Eglise, ou Mlle Adrienne Yard (Rosière de Villennes) reçut de M. Peheu le don de 500 francs offert parles organisateurs. Elle fut vivement félicitée par MM. Charles Reibel Député, Caffin Conseiller Général, et Lamiraux, Maire de Villennes. Le soir un feu d'artifice suivi d'un grand Bal de nuit termina cette joyeuse journée à laquelle seul le soleil fît défaut.

Journal de Poissy, Meulan, St-Germain-en-Laye, Rueil, Maisons-Laffitte, Marly-le-Roi, 24/5/1928

La chanson de la Rosière

Cette ½uvre de Jean Péheu a été chantée le 27 avril 1928 par ce célèbre "chansonnier" ; il possédait plusieurs maisons à Villennes, dont celle où il résidait ruelle de la Lombarde, et participait à l'animation du village.

 

Premier Couplet

Il paraît qu' vers l'année 800
Des pirat's remontant la Seine
Cachèr'nt dans un trou, un grand trou Normand
Un trésor à Villennes,
Et depuis ce temps dans l' Pays
Tout le mond' selon la légende
Cherche l'endroit où les Pirat's ont mis
L' trésor que chacun d'mande
Mais maint'nant c'est fini, laissant argent et or
Nous avons pu trouver le plus pur des trésors

—   Refrain

Et ce trésor sans plus d'mystère
C'est la Rosière (bis)
Pour la voir on vient de partout
Elle est gentill' comm' tout
Ell' s'ra couronnée par M'sieu l'Maire
Notre Rosière (bis)
A Villenn's tout l' mond' l'aim' beaucoup
Elle est gentill' comm' tout !

Deuxième Couplet

Grâce à ell' tous les habitants
Ont continuell'ment le sourire
Ils se sent'nt heureux, ils ont l' c½ur content
Et ne pens'nt plus qu'à rire
Bref maint'nant ici tout va bien
Pour nous la vie chèr' n'est qu'un leurre
On s' fîch' de tout mêm' des politiciens
Et d' leur assiette au beurre,
Si bien qu' pour nos impôts l' jour de la Perception
En présentant nos feuilles très gaîment nous chantons  :

—   Refrain  

Et ce trésor sans plus d' mystère
C'est la Rosière (bis)
Pour la voir on vient de partout
Elle est gentill' comm' tout
Ell' s'ra couronnée par M'sieu l' Maire
Notre Rosière (bis)
A Villenn's tout l' mond' l'aim' beaucoup
Elle est gentill' comm' tout !

Troisième Couplet

Bref d'ici 2 ou 3000 ans
En lisant l' histoir' de Villennes
Les p'tits d' nos p'tits des p'tits d' nos p'tits enfants
Constateront sans peine
Qu' si leurs ancêtr's aimaient l' Progrès
La T.S.F., l'automobile,
Ils savaient aussi comm' tout bon Français
Parfois se rendr' utiles
Afin que bien  plus tard beaucoup d' petits rosiers
Pour fêter leur Rosièr' puissent encor' chanter.

—   Refrain   —

Et ce trésor sans plus d' mystère
C'est la Rosière (bis)
Pour la voir on vient de partout
Elle est gentill' comm' tout
Ell' s'ra couronnée par M'sieu l' Maire
Notre Rosière (bis)
A Villenn's tout l' mond' l'aim' beaucoup
Elle est gentill' comm' tout !

 

Nous n'avons pas encore retrouvé la musique que Jean Péheu avait choisie : un air de fox-trot de la chanson populaire Eléonore, créée au Théâtre du Boulevard, dans l'opérette Au Béguin des Dames, de MM. Chantrier et Nazelles.

Il est à noter qu'un ancien directeur de ce théâtre, Louis Emile Havez, avait acquis en 1891 une maison à Villennes, la villa "Beau Séjour" rue du Président (devenue l'avenue Georges Clemenceau) ; il a été maire du village de 1897 à 1899.

Vous pouvez écouter notre interprétation comtemporaine de la chanson de la Rosière de Villennes.



Autres fêtes de la Rosière

 

Une autre année, la Rosière et ses demoiselles d'honneur sont assises au sommet d'un char, décoré d'une lyre et de roses.

Sur la photo ci-contre, il passe entre l'entrée de la terrasse de l'hôtel-restaurant "Le Sophora" et le magasin du cordonnier, B. Deshayes.


Dans un lieu boisé non identifié, le maire, accompagné de conseillers municipaux, ne couronne pas la Rosière, Raymonde Conté, mais lui remet un bouquet de roses.

Elle est entourée par les deux demoiselles d'honneur, sa cousine Geneviève Conté et Irène Truet.

 

On peut reconnaître sur la photo d'autres figures de Villennes : le Docteur Fauvel, Jean Gabirou (maçon), Roger Petitjacques (menuisier) et le secrétaire de mairie, Paul Cazanave.

Certaines fêtes se sont terminées par un bal costumé, parfois organisé par l'Amicale des Commerçants & Entrepreneurs.

 

Michel Kohn